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Circuits courts Le foin alimentaire, leur « botte secrète »

Depuis 2019, le Gaec a fait entrer deux nouveaux associés et la SARL a embauché une salariée. De gauche à droite : Lauranne Marie, Adrien, Lucien et Michel Chatel, et Alain Delangle. © Alexis Dufumier

Pour créer de la valeur ajoutée, l’élevage laitier de la Claie, dans l’Orne, s’est lancé dans la valorisation de foin et de viande surgelée bio depuis 2019.

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Le Gaec de la Claie, à Saint-Fraimbault dans l’Orne, n’en est pas à son coup d’essai. Depuis trente-cinq ans, cette exploitation laitière aura créé plusieurs fois la surprise autour d’elle. La première remonte à 1988, alors que les deux fondateurs, Alain Delangle et Michel Chatel, décident de fonder leur ferme en Gaec, en dehors de tout lien familial. « Nous nous connaissions depuis l’enfance mais, à l’époque, cela n’était pas très courant. Pour nous, c’était une belle façon de pouvoir être libre un week-end sur deux et de vivre notre passion sans nous tuer à la tâche », se souvient Alain.

Les producteurs misent sur le e-commerce pour élargir leur clientèle. © Alexis Dufumier

Passage à la bio

Le deuxième « choc » a lieu dix ans plus tard, en 1997, lorsque les deux éleveurs décident de passer en bio. « Notre choix a pu étonner car nous étions plutôt considérés comme une exploitation moderne avec une ration à base de maïs, poursuit l’éleveur. Quelques années après avoir retourné des prairies, nous commencions à en voir les limites, avec une hausse des besoins en engrais et en produits phytosanitaires. L’agriculture biologique nous permettait de repartir sur un système herbager avec une valorisation. Nous sommes contractuellement restés au sein de la laiterie Lactalis, mais notre lait est transformé en local par la laiterie de la Motte. »

Séchage en grange

En 2019, troisième coup d’éclat avec le lancement de la vente de foin pour la préparation culinaire, avec une forte valeur ajoutée à la clé. La SARL « Michel et Alain fermiers bio » est alors créée pour ce débouché et la vente de viande surgelée (lire l’encadré). Au cours des dernières années, les éleveurs ont aussi construit un séchage en grange de 400 t de capacité.

En 2019, le Gaec saisit l’opportunité d’associer les deux fils de Michel : Lucien et Adrien. Une salariée, Lauranne Marie, rejoint la SARL début 2021 grâce à une aide du plan de relance. La jeune femme d’origine citadine est titulaire d’un BTS « productions animales » et d’une licence. Elle pourrait bientôt s’associer à l’activité commerciale.

« Nous avions envie de développer une activité de vente directe dès 2018, mais sans trop investir car je ne suis plus en début de carrière, souligne Alain Delangle. Nous avions déjà un séchoir et un foin bio de très bonne qualité, c’est comme cela que le projet est né. » De fil en aiguille, l’éleveur rencontre Hubert Nobis, chef étoilé dans l’Orne, qui a coutume de cuisiner au foin. Des liens sont noués, ils aboutissent notamment à communiquer autour de différentes recettes. D’autres grands noms de la gastronomie se grefferont par la suite à la démarche. « Cette reconnaissance de grands chefs a été extrêmement importante pour nous », insiste Lauranne, également passionnée de photographie et à la tête d’un blog culinaire (1).

Des partenariats pour la transformation

Le caractère insolite de la production attire les télévisions et journaux grand public. Les éleveurs se font aussi démarcher pour vendre du foin pour les nouveaux animaux de compagnie. L’ensachage est réalisé à la ferme, en partenariat avec un ESAT (établissement ou service d’aide par le travail).

Glace, bière, confiture, yaourt, sodas…, l’activité de foin alimentaire se développe via des partenariats avec des transformateurs pour créer différents produits dérivés. « Nous sommes une structure légère. Nous n’avons pas vocation à tout produire, déroule Alain. Nous faisons comme la grande distribution qui délègue la transformation. Sauf que notre marque, c’est une marque de producteurs. »

Le succès des produits leur donne l’envie de professionnaliser l’activité et d’aménager au sein de la ferme un atelier de transformation, et pourquoi pas y associer des panneaux photovoltaïques sur la toiture, un magasin et un espace de coworking pour que différentes énergies puissent se retrouver. « Je suis convaincu que l’avenir de l’agriculture passe par la rencontre avec les citadins, mais c’est une autre histoire », lâche Alain Delangle, qui pilote par ailleurs un projet de jumelages villes-campagnes avec Campacity.

Alexis Dufumier

(1) www.papillhotenormande.com

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